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Nous sommes le 7 mars 2021, la veille de la Journée de la femme. Le harceleur qui a détruit ma vie professionnelle et sociale vient d'être élu syndic de sa commune dans le canton de Vaud.
Qui est-il? Il n'est autre que l'ancien directeur de qualité de Nestlé, reconnu par deux tribunaux du canton de Vaud pour m'avoir harcelée pendant quatre ans, le responsable de la sécurité des aliments de l'entreprise, détruisant ma carrière et m'infligeant de terribles souffrances. Au point de me rendre malade et de m'entraîner dans un procès sans fin. Ses déclarations au tribunal permettent de cerner sa personnalité. Il a expliqué à la juge que le terme «compétence» signifie, je cite: «être capable d’utiliser une capote (terme vulgaire pour préservatif) sans avoir besoin d’un mode d’emploi». Il a également déclaré qu’il basait ses décisions sur les informations du livre de cuisine le «Larousse gastronomique» plutôt qu’auprès de scientifiques.
En outre, il a été délibérément négligent dans la gestion de la sécurité des aliments, ce qui a été la cause de mes conflits avec lui. Il a mis en danger la vie d'enfants, et des incidents mortels ont fini par se produire. Bien sûr, il n'a pas agi seul. Il a travaillé sous la direction de l'ancien PDG de Nestlé, aujourd'hui président du conseil d'administration de Nestlé.
Malheureusement, mon cas n'est pas une exception. Il arrive trop souvent que des salariés compétents, femmes ou hommes, sont harcelés, leur vie détruite alors que leur agresseur continue de monter dans la hiérarchie de la société.
Certaines des affaires qui ont été portées à mon attention sont des affaires non résolues, «cold case» comme on dirait en anglais. Par exemple, l’expérience de Mme Serèn Guttmann, l’ancienne directrice du service d’accueil des requérants d’asile de la Croix Rouge fribourgeoise, minutieusement documentée dans son livre L’envers du décor – Petite contribution à l’histoire de l’asile en Suisse (voir l’essor d’octobre 2015). Comme pour moi, ses agresseurs n’ont jamais été sanctionnés et continuent à jouir d’une vie professionnelle riche.
Qu’en est-il de la justice pour les victimes? Si les problèmes sont oubliés par la société, les victimes n'oublient pas l'injustice. Si nous laissons le temps effacer le droit à la justice, laver les crimes sans que les criminels ne se repentent jamais, alors les criminels n'auront qu'à jouer avec le temps pour échapper à la sanction.
La violence au travail, de la manipulation au harcèlement psychologique, augmente dans l’univers de travail concurrentiel de notre époque. Il s'agit d'une criminalité subtile et sournoise. Même si notre législation est en retard, il n'y a aucune raison pour que la société ne réagisse pas.
En Suisse, le délit de harcèlement moral et le mobbing ne sont pas sanctionnés. Et leurs auteurs jouissant d'une totale impunité se voient récompensés, promus. Tandis que les employés compétents sont exclus du lieu de travail.
Est-ce là la morale de notre époque?