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À la suite d’un échange d’idées entre intellectuels suggérés par la Société des Nations afin de servir la cause de la paix, il y eut une correspondance entre Einstein et Freud en 1932, publiée en 1933 (GW XIV). On peut lire la réponse de Freud à Einstein sous le titre cité cidessus dans «Résultats, idées, problèmes » (PUF 1985, II 1921-1938. Freud, page 203).
Essayer de relater brièvement un exposé de Freud, c’est trahir le texte original écrit avec une grande modestie, beaucoup de nuances et quantité de réflexions subtiles. Allons-y tout de même…
1er point – Freud approuve l’idée d’Einstein: «une prévention efficace des guerres n’est possible que si les hommes s’entendent pour mettre en place un pouvoir central auquel est transféré le droit de jurisprudence pour tous les conflits d’intérêt». Freud souligne que, comme dans le règne animal qui est le nôtre, les conflits furent d’abord résolus par la violence. Ensuite, ils furent aggravés par l’usage des armes (que seul l’homme inventa!), puis étendus entre communautés. Et même si, avant la guerre de 1939 à 1945, il existait une SDN, il n’y a toujours pas encore à l’heure actuelle ce pouvoir central tant souhaité par les uns, refusé par les autres! Donc, c’est toujours le plus fort qui gagne aux dépens du plus faible.
2e point – Einstein s’étonne «qu’il soit si facile de susciter chez les hommes un tel enthousiasme guerrier»; il présume «que quelque chose agit en eux, une pulsion de haine et d’extermination, qui répond à une folie prédatrice ». «Puis-je à ce propos, répond Freud, vous exposer une partie de ma théorie des pulsions, à laquelle, en psychanalyse, nous sommes parvenus après maint tâtonnement et atermoiement? Nous admettons que les pulsions de l’homme ne sont que de deux sortes, soit celles qui visent à conserver et à unir, soit celles qui visent à détruire et à tuer… pulsion d’agression ou pulsion de destruction, opposition universellement connue entre l’amour et la haine».
Attention aux jugements de valeur, dit Freud, car «l’une de ces pulsions est tout aussi indispensable que l’autre des interactions et des réactions de ces deux pulsions procèdent les phénomènes de la vie».
Voilà une des constatations essentielles de la psychanalyse et toute la suite et fin de la lettre permet à Freud de formuler une série de digressions sur le sujet qu’il n’est pas possible, malheureusement de relater ici. En définitive, Freud se dit pacifiste par conviction et souhaite que, de minoritaires qu’ils sont, les pacifistes deviennent majoritaires. Les faits ont démontré depuis lors qu’il n’y a là qu’un voeu pieux! Freud termine sa lettre par une phrase que je n’oublierai jamais: «Je vous salue cordialement et, si mon exposé vous a déçu, je vous en demande pardon ».