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Est-ce possible de faire preuve de créativité quand on sert une institution porteuse d’une tradition bimillénaire? A première vue, non, si on attend d’elle la pure répétition de ce qui a déjà été dit. Et pourtant… cette institution, paradoxalement témoin de l’éternel, suscite des attentes et révèle des besoins importants, principalement dans le domaine de l’écoute inconditionnelle. Dans un monde où tout semble permis, en fait, c’est un grand isolement qui a pris la place d’une communauté naguère imposée.
Dans le domaine qui me concerne, l’aumônerie des étudiants, la créativité me semble résider non dans une forme d’art ou de création de produits, mais dans la confrontation humaniste avec ceux et celles que je rencontre. Je découvre que la créativité naît de la rencontre, de la capacité de s’exposer à des personnes, à des opinions et à des situations inattendues, qui pourraient au premier abord paraître incongrues. J’ai le sentiment de faire preuve de créativité sans le savoir à l’avance, sans l’avoir voulu et sans y avoir réfléchi préalablement.
Rencontrer un étudiant venant d’un pays dictatorial et imaginer comment il pourra rentrer chez lui en créant un réseau national et international de protections. Pratiquer de longues conversations depuis plus de trois ans par messagerie électronique avec un étudiant gothique. Ecouter attentivement et sans jugement un apprenti qui a envie de planter une épée dans le ventre de son beau-père et lui dire: «Avant de le faire, envoie-moi un SMS»!
Ces situations m’ont mis en demeure de me dire: qu’est-ce qu’il y a de pertinent dans ce que je représente, qu’est-ce que je peux apporter de neuf, de surprenant parfois pour débloquer une situation ou tout simplement créer une relation féconde?
Dans ma situation, la créativité s’apparente à une acceptation inconditionnelle de mon interlocuteur, puis à un choc dû à la confrontation de traditions et d’opinions différentes, parfois étranges. Non pour juger, mais pour comprendre, non pour convaincre, mais pour saisir, non pour parler, mais pour écouter d’abord, non pour prêcher, mais pour réviser, si besoin est, ma propre appréhension des personnes et des choses.
Depuis que je suis engagé dans cette démarche, paradoxalement, je n’ai rien perdu de mon identité. Au contraire, je crois qu’elle s’est élaguée, affinée, dans la recherche de pistes de solutions pour l’avenir, le mien comme celui de mon vis-à-vis.
Ne jamais croire qu’une situation soit perdue ou qu’une personne ne soit pas digne qu’on s’intéresse à elle comme à son destin… Une nouvelle manière d’être créatif, pour créer, en partenariat, des instants de vie déterminants.