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Des millions de réfugiés errent de par le monde; ils fuient les pays où sévissent des guerres civiles, ceux où une ethnie en écrase une autre (Turcs contre Kurdes, Cinghalais contre Tamouls), ceux où règnent des dictateurs.
Devant ces situations qui engendrent des réfugiés, que fait la Suisse? Pas grand-chose, semble-t-il. Elle n’ose s’attaquer aux dictateurs que quand ils sont par terre (Marcos, Duvalier); quand ils règnent encore et placent leur argent en Suisse, on ne souffle mot, ça gênerait les exportations. Nous vendons beaucoup à la Turquie, même des armes; avons-nous exercé une pression suffisante pour que ce pays change sa politique à l’égard des Kurdes? Il ne semble pas. Donc face aux dictateurs (Pinochet), aux régimes racistes (Afrique du Sud), nous restons cois. C’est plus prudent. Malheureusement c’est un premier signe de lâcheté.
Mais voici que les réfugiés, qu’engendrent ces régimes, se pressent à nos frontières. Quel dérangement! Le peuple murmure à la vue de certains visages basanés. Alors nos députés s’affolent. Le peuple est mécontent. Vite, vite, changeons la loi sur l’asile, même si l’actuelle autorise déjà une politique restrictive. Rendons-la plus sévère encore, prévoyons des camps pour interner ou même emprisonner les réfugiés. Ainsi les Suisses ne les verront plus: multiplions les obstacles devant les requérants d’asile, refoulons-les au mépris des traités que nous avons signés. Si nous nous aplatissons ainsi devant les xénophobes, peut-être le peuple votera-t-il quand même pour nous en automne prochain… Deuxième signe de lâcheté, celle de nombreux élus qui n’osent plus défendre une politique d’asile digne de ce nom. Mais leur dérobade provoque alors un geste de courage: le lancement d’un référendum contre cette nouvelle loi et son aboutissement grâce à de nombreuses bonnes volontés.
Il y a, hélas, une troisième lâcheté, la pire, celle qui consiste à se montrer d’autant plus cruel qu’on ne risque rien.
Devant les gouvernements, la Suisse s’incline, pour sauver ses exportations, mais devant des hommes de chair et de sang, des hommes qui ont peur, qui souffrent, qui se terrent, qui sont rejetés d’un endroit à l’autre, alors là elle devient impitoyable. Pensez, ces gens ne peuvent pas se défendre et ils ne peuvent rien nous acheter. Pourquoi se gênerait-on de les reconduire à la frontière, de les fourrer dans un avion entre deux policiers, de séparer un père de ses enfants ou tout bonnement de leur refuser l’asile? Que risque-t-on à le faire? Rien du tout, ces gens sont faibles et désarmés. Devant cette nouvelle lâcheté, des hommes et des femmes se sont levés pour défendre ceux que l’on traque. Intervenir en leur faveur, les cacher parfois. Toutes les églises de Suisse forment un rempart derrière ces nouveaux chevaliers.
Bientôt nous allons voter. Quel camp allons-nous choisir? Le peuple suisse a eu, dans les siècles passés, une réputation de grand courage. Va-t-il la conserver en volant au secours des victimes, en refusant une loi qui accable les plus faibles? Ou se laissera-t-il glisser dans la lâcheté, comme le lui recommandent, hélas, les Chambres fédérales et certains grands partis?