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«Rien ne sert de courir, il faut partir à temps.»
Le lièvre et la tortue
Lorsque le thème du forum s’est porté sur les fables de La Fontaine, j’ai spontanément choisi «Le lièvre et la tortue» tant le début de la fable «Rien ne sert de courir» m’interpelle, sensible que je suis à l’accélération stressante de notre monde actuel.
Le début d’un article, consacré aux lapins de Pâques, dans le journal Moins du mois d’avril, m’a amenée à considérer la fable et ses deux protagonistes sous un angle différent de celui de La Fontaine. L’auteur de l’article stigmatisait l’étalage surabondant de cet animal en chocolat dans les supermarchés. Il citait le lièvre de la fable comme l’avatar de l’homme pressé, poussé par l’urgence, et crâneur! J’ai vu alors les deux personnages de la fable comme étant l’illustration, un peu caricaturale il est vrai, de notre société occidentale à deux vitesses. L’illustration d’un clivage déjà bien présent au temps de La Fontaine et qui n’a pas disparu depuis, malgré les changements de régimes qui se sont succédé.
Monsieur Lièvre m’est apparu tel le représentant d’une classe sociale aisée, un riche dilettante, méprisant envers plus pauvre que lui. Sa vie est faite de flâneries, de loisirs, de divertissements et de bonne chère, il a «du temps de reste(…) pour dormir, et pour écouter d’où vient le vent!». Ayant de quoi satisfaire toutes ses envies et même plus, il ne se préoccupe nullement de la fin de sa vie.
Madame Tortue, elle, n’a guère de moyens, elle «porte sa maison», c’est-à-dire qu’elle peine chaque jour pour s’acquitter de plein de charges pécuniaires, elle ne peut sortir de sa routine, l’establishment lui impose un trajet sans détours ni fantaisie si elle veut vivre à peu près décemment jusqu’à la fin de ses jours.
Fatiguée de tant d’efforts, Madame Tortue arrive la première au bout de son parcours de vie qu’elle ressent comme un soulagement. Monsieur Lièvre, lui, commence à s’agiter, se sentant vieillir. Il dépense moult argent en cures et traitements de toutes sortes pour essayer de prolonger son existence. Malgré tout, les derniers élans de ses médecins resteront vains, Monsieur Lièvre trépassera peu après Madame Tortue.
À cette fin inéluctable, la mort, nous y arriverons tous, riches et pauvres, quel que soit notre parcours, l’existence que nous aurons menée. Ce sera là ma conclusion, même si elle est bien différente de celle de La Fontaine!