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L'Occident, c'est pour moi un concept très général et très concret. C'est l'ensemble auquel nous appartenons, ce sont les pays des hommes blancs, chrétiens et inventeurs de l'argent autiste qui ont colonisé le monde. Si je parle d'argent autiste, c'est que l'argent a pris une place unique dans notre civilisation, il est devenu une valeur en soi qui n'a d'autre fin que lui-même.
Les civilisations de toutes les parties du monde ont leur grandeur, la nôtre aussi. Mais nous avons eu l'immense tort de nous penser supérieurs aux autres, et nous n'avons eu de cesse de détruire les autres civilisations en niant leur droit d'être, car seule la nôtre était digne d'exister. Et à ce prétexte, nous avons pillé le monde.
Et maintenant nous en payons la facture! En entraînant dans notre chute beaucoup de populations qui n'en peuvent rien. Nous le payons de deux manières.
D'une part par un écroulement des valeurs. L'argent a petit à petit mangé les valeurs dont notre civilisation était porteuse. Et il reste un grand vide dangereux pour notre âme. D'autre part, notre attitude belliqueuse a causé tellement de désastres dans le monde que nous en recevons maintenant le retour de bâton.
Sur le plan humain, il y a eu la colonisation de toutes les parties de la Terre, en particulier bien sûr depuis les grands colons du 15e siècle. Et puis, après les deux guerres mondiales générées par l'Occident, et une parenthèse où l'on a pu se croire aller vers un monde plus équilibré avec l'émergence de ce mouvement si important des pays non-alignés, l'Occident a repris les choses en mains, ce que l'on a vécu sous les formes du néocolonialisme et de l'ultralibéralisme. Ce mouvement, d'une force telle que rien ne semble pouvoir lui résister, s'est révélé dans toute son horreur par l'écrasement du monde arabe et moyen-oriental (Irak, Afghanistan, Libye, Syrie, Yémen, sans compter la Palestine), et par l'écrasement économique de l'Afrique.
Le résultat, c'est d'une part ce qu'on appelle «terrorisme», qui n'est qu'une réponse aux guerres incessantes que l'Occident a menées dans le monde, et d'autre part les migrations de populations dont le cadre de vie a été irrémédiablement cassé.
Et tout ceci a pour conséquence les régimes populistes qui essaiment dans nos pays, avec pour fleuron l'invraisemblable caricature qu'est Trump aux USA. Le problème n'est pas Trump. Trump n'est qu'un guignol et un triste sire à deux pattes. Le problème, c'est qu'on puisse donner tant de pouvoir à un seul homme. Et que ce Trump a été choisi par soixante millions de personnes!
Et puis, au delà de l'espèce humaine, notre civilisation aveugle et insensible s'est attaquée avec une violence inouïe aux animaux et à la nature. Et cela aussi nous met dans une situation inextricable. Je n'ai pas besoin de m'étendre sur la question. A part les capitalistes fous qui poursuivent sans relâche leur fuite en avant, appuyés par les «climatosceptiques», plus personne n'est dupe de la situation: les changements climatiques commencent à se faire voir dans toutes leurs conséquences. Il ne s'agit pas d'une question d'optimisme ou de pessimisme. Il s'agit simplement de voir les choses comme elles sont.
Alors on peut faire quoi? Un homme prêche dans un certain désert depuis de nombreuses années, c'est notre ami Pierre Lehmann. Qui ne cesse d'en appeler à un changement de modèle social, et de dire que seule une société de proximité, donc une économie de subsistance, constitue une réponse aux problèmes du monde actuel. Et il a raison. Ce qui se traduit dans l'immédiat concret pour chacun de nous par le retour à un mode de vie simple et par la culture de relations harmonieuses avec son entourage. Par la pratique de relations de partage et d'échanges de services en lieu et place de relations de concurrence.
Et par ne pas avoir peur de penser autrement que ce que le système réclame de nous. Ne pas avoir peur de dire et répéter que la société humaine se doit de supprimer les armes de destruction massive, de supprimer le nucléaire, guerrier ou pacifique, qu'elle doit aller vers un monde sans armes; qu'elle doit réguler l'usage de l'argent en le réduisant à sa fonction première de moyen d'échange.
C'est ainsi que nous pouvons commencer à tisser autour de nous un monde où les individus se réapproprient leur vie et cultivent entre eux des relations de bien-être.