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« Si vis pacem, para bellum » (si tu veux la paix, prépare la guerre). Ce slogan stupide, probablement inventé par un général romain, voire par Jules César lui-même, sert encore aujourd’hui aux militaristes pour justifier l’existence des armées, renforcer l’armement de leur pays et promouvoir l’achat d’armes toujours plus perfectionnées et meurtrières. C’est l’armée qui cautionne l’existence des armes et d’ailleurs la vente d’armes à des civils nécessite une autorisation, au moins en Suisse. Mais il est vrai qu’aux Etats-Unis tout le monde peut se procurer des armes et leur possession semble considérée comme une sorte de droit fondamental du citoyen. Ces armes provoquent inévitablement des drames de temps en temps.
L’existence d’armes est indissociable de l’existence du pouvoir. Les armes sont nécessaires au pouvoir pour asseoir son autorité. Ces armes sont détenues par l’armée ou la police, donc des institutions servant à maintenir le pouvoir entre les mains de ceux qui gèrent le pays. Chaque pays doit se persuader qu’il court le risque d’être envahi, ou en tout cas attaqué par un autre. Il faut persuader les citoyens que les moyens de contrainte sont nécessaires pour les défendre. Et comme tous les pays ou presque ont des structures de pouvoir, c’est à qui aura les armes les plus puissantes. On en est ainsi arrivé à inventer la bombe atomique. Ce sont les Etats-Unis qui l’ont mise au point en premier. Malgré leurs efforts pour en garder le secret, d’autres Etats sont parvenus assez rapidement à la fabriquer aussi. Les secrets techniques ne peuvent pas être gardés très longtemps, l’intelligence humaine étant disponible pour les pires sottises dans presque tous les pays. La bombe atomique et la bombe à hydrogène (fusion nucléaire) qui l’a suivie ont atteint une puissance telle que leur utilisation dans un éventuel conflit menacerait la survie de l’humanité. Le développement des armes a ainsi atteint le paroxysme de l’absurdité.
L’effort des Etats pour mettre au point des armes si possible plus puissantes que celles de leurs voisins a été, et probablement continue, a être très important. Cette activité, au fond aberrante, a certainement coûté très cher aux citoyens de ces Etats, sans parler du coût que représente le maintien d’une armée. Après la Deuxième Guerre mondiale, le Japon qui avait subi l’explosion de deux bombes atomiques à Hiroshima et Nagasaki, avait inscrit dans sa Constitution qu’il renonçait à l’armée et aux armes. On peut penser que cela l’a aidé à devenir rapidement une grande puissance industrielle puisqu’il a su éviter de gaspiller efforts et argent pour produire des armes de destruction massive. Un tel effort serait aujourd’hui d’autant plus vain que les sociétés dites développées ne sont plus en mesure de faire la guerre. Cela n’est pas dû au fait qu’elles ne pourraient pas se défendre, mais au fait qu’elles ont sur leur territoire des cibles potentielles dont la destruction rendrait la vie impossible sur des surfaces importantes autour de ces cibles: centrales nucléaires, stocks de déchets nucléaires, usines de retraitement de ces déchets, usines chimiques, barrages hydroélectriques.
On en est arrivé au stade où les moyens de faire la guerre rendent la guerre sinon impossible, du moins parfaitement absurde. Le plus étonnant est que, malgré cela, les Etats insistent pour maintenir des armées et obligent leurs citoyens à faire du service militaire. Il est vrai que les effectifs des armées, en tout cas de l’armée suisse, ont été considérablement réduits.
La fabrication d’armes et la préparation d’une éventuelle guerre font aujourd’hui partie intégrante des activités jugées nécessaire à la sécurité, mais aussi à la prospérité des Etats. Ces activités continuent à se développer tout en devenant de plus en plus meurtrières. On en est arrivé au stade où ceux qui détiennent le pouvoir, en Suisse et ailleurs, ne sont même plus capables de concevoir un monde sans armes. Pourtant un monde sans armes serait la meilleure garantie que l’aventure humaine puisse se poursuivre sur cette planète.
Le problème est qu’aucun Etat ne veut faire le premier pas et désarmer unilatéralement. La Suisse par exemple n’aurait rien à perdre à le faire, même si son exemple n’est pas suivi rapidement par d’autres nations. D’affirmer qu’on ne se reconnaît pas d’ennemi est encore le meilleur moyen de ne pas en avoir. C’est ce que proposait l’initiative pour une Suisse sans armée approuvée par une relativement forte minorité il y a une trentaine d’années.
Le commerce des armes reste probablement très lucratif et l’obsession de la croissance économique ne permet pas d’y renoncer. Peut-être faudra-t-il attendre que les tenants du pouvoir comprennent que nous vivons dans un monde fini dans lequel une croissance économique permanente est impossible. Cette réalisation devrait aussi favoriser le renoncement aux armées et aux armes.