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Il y a 25 ans, en 1989, l'essor publiait des extraits d'une conférence de Lucien Borel. Lucien Borel, décédé en 2007, fut un scientifique humaniste et l'un des rares professeurs qui se soit engagé avec détermination contre le développement de l'énergie nucléaire, quitte à se mettre en opposition avec ses collègues. Il considérait que cette énergie impliquait des risques dont les conséquences étaient au-delà de ce qui est humainement acceptable. Professeur à l'EPFL, il développa le concept d'exergie qui permet de prendre en compte le deuxième principe de la thermodynamique, la notion d'irréversibilité, dans les bilans énergétiques. Son ouvrage «Thermodynamique et Énergétique» reste une référence incontournable.
— Pierre Lehmann
L'exploitation de l'énergie nucléaire est apparue il y a quelques décennies comme la manifestation du génie humain, à cause de son aspect scientifique et technique. Au début, les plus grands efforts de développement ont été consentis par les gouvernements à cause de la perspective de son exploitation à des fins militaires. Ce n'est que plus tard que ces efforts ont été orientés en vue de son exploitation à des fins civiles, permettant ainsi à la conscience collective de se dédouaner par rapport à l'horreur de la bombe atomique.
L'exploitation de l'énergie atomique à des fins civiles a suscité de grands espoirs pour résoudre les problèmes énergétiques de nos sociétés. Elle s'est développée à cause de certains avantages indéniables […]. Mais elle s'est surtout imposé ces dernières années à cause des illusions habilement entretenues par les promoteurs du nucléaire: mythe du besoin, mythe de l'énergie inépuisable, mythe de l'énergie sûre, mythe de l'énergie bon marché et enfin mythe de l'énergie propre et maîtrisée. Tous ces mythes ont été largement dénoncés par les opposants au nucléaire. […]
Il convient de rappeler que le recours à la technique des centrales nucléaires est l'œuvre de l'homme. Il en résulte qu'un accident majeur d'un réacteur nucléaire n'a aucunement le caractère de fatalité que l'on peut reconnaître à une catastrophe naturelle, mais présente au contraire le caractère de libre choix que l'on doit attribuer à une catastrophe artificielle. Dès lors, les tranquillisants administrés aux citoyens par les promoteurs du nucléaire pour faire apparaître le risque nucléaire comme inéluctable doivent être dénoncés comme étant inacceptables […].
Dès lors, nous pouvons nous poser les questions qui suivent :
En présence de toutes ces questions, nous pouvons nous demander si le moment n'est pas venu de jeter un nouveau regard sur la matière, sur la nature et sur la vie […]. Actuellement, ne sommes-nous pas dans une vaste crise évolutive où l'asphyxie et l'horreur nous obligent impérativement à passer dans une autre dimension de conscience. L'homme a utilisé ses pouvoirs pour aménager son environnement, mais, maintenant, il doit peut-être se transformer intérieurement pour devenir ce qu'il est dans son essence, c'est-à-dire un être conscient, lumineux et chaleureux […]. En fait, l'homme a la chance merveilleuse de faire des choix afin de réaliser pleinement sa destinée cosmique. Dans cette perspective, ne faudrait-il pas qu'il écoute davantage l'historien, le biologiste, l'écologiste, le philosophe, l'artiste, le poète, et tous ceux qui ont, pour l'homme de demain, la vision d'un homme splendide […] ?