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Sous le respectable concept de «pollueur-payeur», il a été introduit par la bande un découplage des services publics dits «rentables» des non-rentables, avec sa cascade de privatisations. Il s'en est suivi un transfert des structures bénéficiaires, construites avec les impôts de la population, vers une logique du profit qui soumet chacun à une taxe standardisée, non proportionnelle à sa capacité contributive. La paupérisation des classes modestes et moyennes était enclenchée. Sous prétexte d'investissements importants, nécessaires pour améliorer les structures, les Etats, signataires des accords de l'OMC, ont accepté, sans l'accord des peuples, de déléguer leurs responsabilités politiques aux entreprises privées.
Un des chantiers en cours actuellement tend à vouloir retirer à l'ensemble des citoyens la propriété collective de l'eau. Par des subterfuges fort sournois, il est signifié à la population que la seule façon de gérer cette matière première si précieuse est de la soumettre aux gracieuses lois du marché. Et, curieusement, beaucoup de nos concitoyens se laissent convaincre qu'il n'y a effectivement rien d'autre à faire. L'argument le plus souvent entendu est: «Y a pas moyen de fonctionner autrement!»
En fait, la problématique fondamentale est que le système de milice qui caractérise notre démocratie est poussé dans ses derniers retranchements par la complexification des dossiers et un certain désintérêt citoyen. L'inflation de nouvelles techniques, outils informatiques, expertises diverses nécessaires pour la bonne compréhension des sujets de consultations, ont grandement participé à cet état de fait. Aussi, les forces démocratiques locales se voient imposer par le niveau fédéral des directives qui tendent à considérer la privatisation comme la seule et la meilleure solution pour alléger le poids des charges collectives. Par ce mécanisme, le démantèlement est en marche, l'appauvrissement de la classe moyenne et modeste programmé puisque les taxes leur coûteront plus chères que le gain d'impôt, et la baisse des coefficients fiscaux sont autant de cadeaux pour les plus nantis. L'exemple des projets actuels concernant la santé publique est aussi tout à fait symptomatique.
Il est impressionnant d'observer cette accélération de la mise sous tutelle de la politique par l'économie. La concentration des pouvoirs financiers et médiatiques a bien provoqué les dégâts qu'on pouvait craindre, en observant ceux subis par les pays dits du «Tiers Monde» depuis la fin des colonies et maintenant appliqués aux économies occidentales. Les conséquences en sont un rétrécissement de la réflexion collective, les alarmes et objections des résistants sont traitées de diatribe par les médias, les arguments alternatifs systématiquement tenus à l'ombre. L'indifférence se généralise, le repli sur son petit pré carré devient la solution qui s'impose par fatigue, paresse ou découragement.
Les outils de la démocratie mériteraient une réactualisation, sachant par définition que la concertation et la recherche de consensus prend du temps. Le rythme effréné des changements force la politique à jouer plus vite que la musique, les nouvelles directives n'ayant même pas le temps d'être mises en application que déjà une autre génération de règles s'annonce à l'horizon.
Il apparaît de plus en plus clairement que cet état d'agitation permanente, de mise en compétition tous azimuts, nécessite un retour au calme de l'ensemble de la société, afin de permettre de prendre le temps de réfléchir et donner à nouveau goût à chacun pour la chose publique.
D'autre part, les directives de l'OMC, AGCS compris (Accord Général du Commerce des Services), devraient impérativement être remises sur le métier afin d'être conçues pour servir les peuples et non les multinationales qui en tiennent les rênes.
Enfin, je rêverai d'une ONU civile, libérée de toutes subordinations, tenant un rôle de tiers-neutre citoyen, et motivée à travailler sur une fluidité, un mieux-être général. Ses collaborations avec les organisations citoyennes devraient pouvoir l'aider à travailler sur une structure démocratique souple, adaptable sous toutes les latitudes et basée sur l'équité et la cohérence. Chacun devrait pouvoir y trouver sa place, les possibilités de participations à la chose publique encouragées, la dynamique sociale protégée des abus de pouvoirs caractérisés.
Je suis tentée de penser que la crise financière actuelle est une excellente opportunité pour fédérer enfin toutes ces forces constructives.