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Avril 2012
Un accord qui a de quoi nous indigner
Auteur : Paul Bonny
Un lecteur revient sur le thème du
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Il y a quelques semaines, hommage a été rendu à Roger Belbéoch, physicien, auteur de nombreux ouvrages dénonçant avec conviction, compétences et loyauté, les dangers du nucléaire. C'est dans l'un de ceux-ci que j'ai découvert, sur une note de bas de page, une information qui m'a stupéfié. Quarante ans plus tard, je m'en souviens encore, comme si c'était hier. Mon indignation demeure intacte. Le nucléaire se prétendait alors sûr et propre, Tchernobyl n'ayant pas eu lieu. Cette note disait en substance: «On ne s'étonnera pas du manque d'intérêt de l'Organisation Mondiale de la Santé pour les risques sanitaires dus à l'énergie nucléaire puisque cette institution est liée, par un accord signé en 1959, à l'Agence Internationale de l'Energie Atomique (AIEA)». Cette révélation à peine croyable m'incita à en savoir davantage. Je me lançai alors dans de laborieuses recherches – internet n'existait pas – afin d'essayer de comprendre.

La réalité dépassait l'entendement! Au sein de l'Organisation des Nations Unies cohabitent deux institutions aux objectifs diamétralement opposés: pour l'une, la protection de la santé des populations et pour l'autre, les intérêts particuliers des exploitants d'activités nucléaires. Mais il se trouve que l'OMS est dominée hiérarchiquement par l'AIEA. Dès lors, celle-ci contrôle les activité de l'OMS afin qu'elles ne nuisent pas au développement et à l'image du nucléaire. Résultat: depuis 1959, l'OMS viole l'article 1 de sa constitution au profit de l'essor d'une industrie dont la puissance n'a d'égal que sa dangerosité. Et cela en toute connaissance de cause: Le bien-être des descendants de la génération présente est menacé par l'emploi grandissant de l'énergie nucléaire (…) Toutes les radiations produites par l'homme sont nuisibles à l'homme du point de vue génétique. L'Organisation mondiale de la santé nous a bel et bien prévenu, en 1958 déjà!

Les 20 généticiens de réputation mondiale, auteurs du rapport, avaient unanimement pressenti le dilemme devant lequel notre pays se trouve aujourd'hui: La mise en valeur de sources énergétiques qui renferment des possibilités aussi considérables dans deux directions oppposées – amélioration du bien-être de l'humanité et détérioration de la race humaine – ne peut manquer de provoquer des répercussions très diverses, directes et indirectes. L'OMS laissait ainsi dans le flou des risques trop terrifiants. Elle n'avait pas le choix. L'accord signé avec l'AIEA, qui est toujours en vigueur, l'obligera désormais à agir en coopération étroite avec les promoteurs de l'atome. Le rapport N° 151 de l'OMS se termine par l'option ambiguë qu'elle a alors choisie afin de concilier sa mission – veiller sur la santé des peuples – avec les consignes des promoteurs de l'atome: La solution la plus satisfaisante pour l'avenir des utilisations pacifiques de l'énergie atomique serait de voir monter une nouvelle génération qui aurait appris à s'accomoder de l'ignorance et de l'incertitude.

Ayant définitivement muselé ceux qui ont le devoir de veiller à ce que le niveau de santé soit le plus élevé possible sur notre planète, les promoteurs de l'atome sont ainsi parvenus à s'assurer une place privilégiée dans les instances décisionnelles internationales qui élaborent les règles de sureté et de radioprotection. Règles dont ils sont censés contrôler l'application!

On comprend dès lors pourquoi l'OMS est la grande muette et la grande absente de la tragédie qui se déroule en ce moment à Fukushima. On comprend aussi pourquoi il a fallu 5 ans à l'OMS pour décider d'apporter une aide à Tchernobyl. On comprend pourquoi l'AIEA, l'OMS et la FAO (Autorité européenne de sécurité alimentaire) ont écarté les preuves que l'irradiation des aliments – technologie en pleine expansion pour la conservation et le ralentissement du mûrissement – est néfaste pour le consommateur et pour l'environnement (anomalies congénitales, génétiques, retard de croissance, stérilité, etc.). On comprend mieux pourquoi une chape de plomb s'est abattue sur les premières informations inquiétantes évoquant les ravages des munitions contenant de l'uranium appauvri (issu des déchets nucléaires de nos centrales). Les populations des zones concernées sont désormais condamnées à vivre dans un environnement contaminé pour toujours. Et il y aurait tant d'autres exemples démontrant les conséquences désastreuses de cet accord pervers entre l'OMS et l'AIEA, hélas encore et toujours en vigueur.

C'est grâce à Roger Belbéoch que j'ai cherché et réuni ces informations. Je souhaite les relayer afin de contribuer à révéler quelques-unes des innombrables zones d'ombres du nucléaire et leurs inquiétants effets sur notre santé, aujourd'hui, et sur celle de nos descendants, demain. A nous de choisir l'avenir que nous désirons leur laisser, d'agir et de réagir en conséquence.

Et rappelons-nous:
«Il ne faut pas compter sur ceux qui ont créé les problèmes pour les résoudre» (Albert Einstein).

Paul Bonny, Crans-près-Céligny

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