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Décembre 2010
Des liens étroits entre l'Islam et la science
Auteur : Nadia Karmous

Note de la Rédaction: nous avons respecté l'orthographe de l'auteure
du texte, notamment au sujet de l'usage des majuscules et de la ponctuation.

 


Lis! Au Nom de ton Seigneur qui a créé, qui a créé l´Homme d´une adhérence. Lis! Et Ton Seigneur est le Très Noble, qui a enseigné par la plume, a enseigné à l´Homme ce qu´il ne savait pas (Saint Coran 96.1).

Lis! Lis! Lis! Premier verset, c'est par ces mots que Dieu interpelle l'Etre entier du bienveillant Prophète Mohammed (*SB) et par là même l'Humanité entière... Depuis ce moment débuta l'extraordinaire richesse de La Civilisation de l'Islam. Le Savoir fleurissait car il était un devoir, un acte de foi pour le musulman. C'est pour souligner l'importance du savoir que Dieu a donné à Son Messager l'ordre d'en acquérir davantage: «Et dis: «ô mon Seigneur, accrois mes connaissances!» (Coran, 20: 114).

Après la première Révélation et durant les vingt-trois ans de la vie de Mohammed, «Seeking knowledge is compulsory on every Muslim». Le Savoir qu'il transmettait illustre les liens étroits entre l'Islam et la Science. Il répétait ses appels pour acquérir le bien le plus précieux selon lui; en disant «La recherche du savoir est obligatoire sur tous les Musulmans». Et: «whoever follows a path seeking knowledge, Allah will make his path to paradise easy». «Quiconque suit un chemin à rechercher du savoir, Dieu lui fera son chemin vers le paradis»; aussi: «Nous apprenons du berceau au tombeau», ou: «L'encre du savant est plus pure que le sang du Martyr».

Guidés par l'appel du savoir, du raisonnement, de la réflexion et de l'observation, les premiers musulmans placèrent le Savoir et les sciences au centre de leur vie pieuse. Femmes et hommes se sont mis à la tache, et dès les premiers temps de l'Islam, les femmes ont été parties prenantes de l'œuvre civilisatrice. Elles étaient professeurs, médecins, et poètes, ... à l'exemple d'Aicha dont le Prophète (SB*) disait : «O gens! Allez acquérir la science de chez cette rouquine». La Dame Hafsa s'est vu confier les manuscrits Coraniques du fait de son exceptionnelle intelligence, de ses vastes connaissances, et de son intégrité. D'éminents savants hommes ont eu comme professeurs des femmes, l'imam El Shafii en est un exemple, parmi tant d'autres. Des centaines d'universités furent construites par des femmes, ainsi que des écoles, des jardins, des fontaines et des hôpitaux, dont celui d'Aziza Othmana, princesse Ottomane, qui fit construire le premier Hôpital moderne en Tunisie.

La civilisation de l'Islam s'est emparée de toutes les branches du savoir, intellectuelles et techniques, qu'il s'agisse du domaine de l'horlogerie de la mesure du temps (pour gérer les temps et directions des Prières), qu'il s'agisse du repérage, sur terre, sur mers et dans l'espace (astronomie) par des cartes et instruments géographiques. Les Musulmans contribuèrent à développer les mathématiques, la mécanique, l'optique, ainsi que des observatoires de tout genre; dont le premier en l'an 830 à Baghdâd (Iraq). Alors, qu'un bon nombre d'instruments astronomiques avaient été inventés par les Grecs, c'est sous les auspices des Califes ou successeurs du prophète Mohammed (*SB) que l'observatoire devint une institution permanente.

Les musulmans établirent et développèrent des institutions importantes telles que: les écoles, les universités, les hôpitaux, les laboratoires, les observatoires, les bains, les prisons, les banques, les marchés...

En exemple, Le Collège-Mosquée d'Al-Qarawiyyin à Fez (Maroc) fut établi en 859, celui de Coûrtoba (Cordoue) au début du dixième siècle, et au Caire resplendissaient Le Collège-Mosquée d'Al-Azhar en 972 ainsi que l'Université de la Sagesse au onzième siècle. En Europe, c'est plus de cent ans plus tard que les premiers lieux d'éducation supérieure naquirent.

La présence de l'Islam en Europe n'est pas récente, mais bien plus profonde qu'on le croit, que se soit en Espagne (restée musulmane pendant plus de huit siècles), en Sicile (musulmane durant quatre siècles) où l'on trouvait trois cent belles mosquées au dixième siècle. Et même en Russie, les lumières de l'Islam ont brillé dès le onzième siècle.

Puis, l'on constate que les sciences de botanique et d'agriculture léguées par Al Idrissi, Al Qazurni, et Ibn Al Awwam s'appliquent toujours et que des techniques de distribution d'eau aux populations, que les méthodes d'irrigation musulmanes sont toujours utilisées de nos jours (en Espagne, à Strasbourg et en d'autres lieux).

Aussi, les procédés musulmans d'organisation des hôpitaux demeurent à nos jours. En effet, la médecine islamique prenait en considération tous les aspects de la vie du patient et était attentive à sa souffrance, conformément à la vision islamique du monde. Elle accordait une attention particulière aux symptômes du patient, aux questions de climat, d'environnement, d'hygiène de vie, de diététique et de régime alimentaire. La médecine arabo-islamique a été à la pointe du progrès durant de nombreux siècles. Le décalage chronologique entre les découvertes des médecins arabo-musulmans et les redécouvertes occidentales est considérable. Il n'est pas rare qu'il atteigne cinq à huit siècles. Le Canon de la médecine d'Avicenne s'inscrit dans une vision universelle de la connaissance chère aux grands philosophes arabes médiévaux. Cet aspect systématique n'échappa pas aux savants de l'Occident latin qui disposèrent, dès la fin du douzième siècle, cent cinquante ans après sa rédaction, de la traduction latine qu'en donna Gérard de Crémone. Avec la fondation des universités européennes, cette œuvre majeure devint la base de l'enseignement médical et philosophique, les maîtres ès arts s'appuyant sur l'un ou l'autre des cinq livres la composant.

 Auteurs de livres scientifiques, philosophiques et médicaux, les savants musulmans foisonnent, comme Avicenne. Averroès (Ibn Roshd), Albategnius de son nom arabe Al-Battânî (855-923), fut le premier savant à avoir établi la trigonométrie, le sinus, le cosinus et la tangente. Al-Khawarizmi (~780 -850) est l'inventeur du traité classifiant la solution d'équations quadratiques et donne des méthodes géométriques pour compléter l'élévation au carré; nous lui devons notre système décimal de numération, et deux mots fondamentaux dans le vocabulaire des mathématiques, celui d'algorithme et celui d'algèbre. Il accomplit dans ce dernier domaine un progrès notable, par son traitement systématique des équations de degré deux. Il représente ici la nombreuse et valeureuse cohorte des mathématiciens musulmans, parmi lesquels on peut citer Thâbit ibn Qurra (mort en 901), Ibn al-Haytham, dit Alhazen (965-1039), grand physicien, mathématicien et philosophe, écrivit le traité d'optique et le traité des glaces, il démontra avec Al Birouni que les rayons lumineux allaient de l'objet vers l'œil, alors que les Grecs avaient avancé le contraire. En plus de ces prouesses, ils étaient connus dans le domaine de la mécanique, domaine que les Arabes appelaient «la science des ingénieuries», comme Al Karaji, qui vécut vers l'an 1000, Omar al-Khayyam (1048-1122), al-Tûsi (vers 1170), al-Samaw'al (mort en 1174), et Ibn Al Qonfoth (1330-1407), théologien et juriste algérien, qui fit progresser le symbolisme algébrique. Ainsi, pour son travail sur la rotation des planètes, Copernic s'appuya sur les recherches qu'd'Ibn Al Chatir avaient faites 200 ans auparavant.

 Dans le domaine médical, le chirurgien andalou Aboul Qâsim (mort en 1013) poursuivit des recherches, sept cents ans avant Percival Pott (1714-1788), sur la tuberculose des vertèbres, connue actuellement sous le nom de mal de Pott. L'ophtalmologue Aboul-Qasim Ammâr ben Ali al-Maousils réussissait à Baghdad, en l'an 1000, à guérir une cataracte par succion avec une aiguille creuse. L'opération ne sera réussie en Occident qu'en 1846 par Blanchet. L'éminent Avempace, de son vrai nom: Abu Bakr Mohammed ben Yahya ben as-Sayegh ou plus court Ibn Baja était philosophe, mathématicien et médecin, Avenzoar, grand Maître en médecine (Abumeron, ibn-Zohr) et Al-Bitrouji (son nom latin est Alpetragius mort en 1204), d'autres ont occupés aussi le premier plan, comme Abderrahmane Ibn Younous qui fut le premier à inventer le pendule des années et cela avant Galilée. Et Ibn Al Nafis (1213-1288) qui fut le premier savant à découvrir la circulation sanguine, trois cents ans avant Michel Servet (1509-1553) et quatre cents ans avant William FIarvey (1578-1657) et l'anesthésie était utilisée dans les opérations chirurgicales. Al Rhazi (Rhazès) fut le premier à utiliser du fil provenant d'animaux en chirurgie, il a réalisé les bases de la pédiatrie.

 D'immenses travaux ont été accomplis dans les domaines de l'architecture, de l'économie, de la mode, de la chimie, de la musique, des arts, de la botanique: Al Daynouri a inventé les normes de la classification des plantes, de la zoologie: Al Jahiz rédigea le célèbre ouvrage de zoologie qui a pour titre «Le Livre des animaux», de sociologie: Ibn Khaldoun établit le «Traité de sociologie», œuvre qui fut reprise 400 ans plus tard par Auguste Comte. De nos jours, certains pensent qu'Auguste Comte est le père de la sociologie.

 Les musulmans d'alors ont conjugué l'amour de la foi, des connaissances, du bien-être et des arts, l'Islam y est complètement compatible. Ainsi, même les princes, les califes, les sultans et les gouverneurs s'étaient lancés et s'adonnèrent avec ferveur aux Savoirs et aux sciences diverses. En effet, à cette mémorable époque, les souverains comme le peuple, tous étaient versés dans l'instruction des savoirs, mais aujourd'hui dans les contrées musulmanes, les savants, s'ils ne sont pas déjà morts, sont en prison, en fuite ou se font invisibles et muets, et leurs souverains baignent dans l'opulence des biens matériels et dans la misère intellectuelle.

La majorité des «biens musulmans» ont disparu après l'invasion mongole en Iraq et après la destruction de l'Espagne musulmane, mais ce qui restera toujours c'est cet appel et ce rappel incontournable et toujours plus puissant de «Ikra»: Lis!


(*SB): Salut et bénédiction

Nadia Karmous
Présidente de l'Association culturelle
des femmes musulmanes de Suisse
( et Wikipédia,
licence Creative Commons
pour certains passages. )

Sources:

 

 



«Ceux qui n'ont pas la foi ressemblent à celui qui entend les sons de la voix sans rien comprendre»

Le Coran, II, 166


«La véritable mosquée est celle qui est construite au fond de l'âme».

 

Proverbe arabe


 

 «Que ceux qui veulent un appui le cherchent en Dieu».

Le Coran, XIV, 15

 

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