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Juin 2018
Assurance maladie, deux initiatives (…)
Auteur : Philippe Lagger

Assurance maladie — Deux initiatives pour sortir de l’impasse

Face aux blocages et à la hausse insupportable des primes d’assurance maladie et des coûts de la santé, le recours à l'initiative populaire est indispensable.

Système tarifaire en panne, libéralisation du financement hospitalier, impossibilité d'instaurer un contrôle de qualité sérieux sur le plan national, explosion des coûts et des primes; le bilan de la gestion fédérale du système d'assurance maladie est décidément inacceptable. Le lobbysme acharné et les liens d'intérêt multiples paralysent à l'excès les capacités d'action des autorités. Face à cette situation, le peuple doit pouvoir donner des impulsions au moyen d'initiatives populaires. C'est la conviction d'un front large d'associations et de personnalités issues notamment des cantons qui ont approuvé l'initiative pour une caisse publique d'assurance maladie de 2014.

Suite à la votation sur l’initiative pour une caisse publique soumise au vote populaire en septembre 2014, un groupe de personnes et d’associations intéressées à des réformes structurelles dans le domaine de la politique de santé et de l’assurance maladie ont poursuivi des réflexions, à l’initiative de la Fédération romande des consommateurs, FRC.

Ces réflexions ont débouché sur la confirmation que rien ne serait possible en termes de développement d’un système de santé de qualité accessible à tous et d’un coût abordable sans la création d’un acteur régional d’intérêt public chargé de compenser tous les coûts ambulatoires et d’envisager sur le long terme les besoins en prévention et en promotion de la santé.

Leur conviction est également faite que le mélange a assez duré entre intérêts commerciaux et exercice d’une tâche publique déléguée aussi importante que l’assurance obligatoire des soins. Depuis le vote de 2014, en effet, aucune évolution positive ne s’est ressentie de la part des assureurs privés. Au contraire, les coûts connaissent une croissance encore plus marquée, notamment en lien avec une libéralisation de l’offre voulue par les assureurs, sans bénéfice notable pour les patients et la qualité des soins qui leur sont prodigués.

Fortes de cette conviction, les personnes et associations unies dans cette démarche de réflexion ont élaboré deux textes d’initiative populaire.

Le premier texte intitulé «Pour un Parlement indépendant des caisses-maladie» entend imposer une incompatibilité nette entre l’exercice de la tâche publique déléguée par l’Etat de mettre en œuvre l’assurance obligatoire des soins et tout mandat de parlementaire fédéral. On ne peut en effet être à la fois surveillé et surveillant, régulateur et régulé.

Le second texte, «Assurance-maladie. Pour une liberté d’organisation des cantons», entend donner aux cantons qui le souhaitent une liberté d’organisation que la LAMal ne leur donne pas aujourd’hui. Il s’agirait de permettre la création de caisses cantonales ou inter-cantonales de compensation chargées de compenser l’ensemble des coûts à charge de l’assurance obligatoire des soins, de fixer et d’encaisser les primes cantonales, et de confier à ces caisses la tâche de financer les prestations de prévention et de promotion de la santé nécessaires à la population qu’elles assurent. Elles délégueraient aux assureurs privés agréés les tâches administratives d’affiliation, de mutation, de contrôle des factures et de développement de modèles particuliers d’assurance et les rémunéreraient à cet effet comme cela se pratique dans l’assurance chômage.

En Suisse, les avancées sociales au niveau de l’assurance maladie ont demandé temps et persévérance. La première loi sur l’assurance maladie, dont le contenu était bien modeste date de 1914. Ce texte avait été combattu par les associations commerciales et patronales. A titre d’information, la première assurance sociale qui passa la rampe fut l’assurance militaire en 1902.

En 1974 une initiative populaire ambitieuse a été refusée par le peuple. Elle demandait l’obligation générale de s’assurer contre la maladie et un financement assuré par une retenue sur les salaires versée conjointement par les employeurs et les salariés. Le contre-projet du Conseil fédéral largement édulcoré fut également refusé par le peuple. Il faudra attendre 1994 avec l’introduction de la LAMaL pour voir apparaître l’obligation de s’assurer. Une initiative du PSS et de l’USS, beaucoup plus progressiste qui lui était opposée, ne reçut pas l’aval du peuple.

Osons espérer que les deux initiatives dont la récolte de signatures est en cours aboutissent et que le peuple, lorsqu’elles seront soumises à son verdict, comprenne qu’elles sont dans son intérêt parce qu’elles donneront plus de transparence et d’équité à tout un système qui reste aujourd’hui opaque et peu solidaire.

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