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Février 2018
Droits humains, depuis 1948
Auteur : François de Vargas

La Déclaration des droits humains date de 1948. Et depuis?

2018 est l'année du 70e anniversaire de la Déclaration des droits humains (officiellement Déclaration des droits de l'homme, ci-après DUDH). C'est en effet le 10 décembre 1948 que fut proclamée par les Nations Unies (NU) cette déclaration, acceptée par tous les Etats membres, sauf l'Arabie saoudite, l'Afrique du Sud et les Etats communistes, qui se sont abstenus. Il faut se rappeler que la majorité des Etats actuels était encore colonisée (donc non membres des NU) et qu'une bonne partie d'entre eux vivait sous la tyrannie stalinienne.

La DUDH, rédigée après 3 ans d'intenses discussions, suite à l'horreur nazie, a été considérée comme une lettre au Père Noël, parce que ce n'était qu'une déclaration et les Etats qui l'ont proclamée n'avaient pris aucun engagement à les appliquer. Il a fallu attendre plusieurs années pour que soient adoptées des conventions que les Etats étaient invités à ratifier et dont ils devaient rendre compte devant des comités ad hoc: Convention sur les Réfugiés (1951), contre la discrimination raciale (1965), les deux Pactes sur les Droits civils et politiques et sur les Droits économiques, sociaux et culturels (1966), les Conventions sur les droits de la femme (1974), la Convention contre la torture (1984), sur les droits de l'enfant (1989), contre les disparitions forcées (2006).

Parallèlement des organisations régionales avaient aussi rédigé des conventions. Ainsi la Convention européenne des DH du Conseil de l'Europe (seule organisation internationale dont la Suisse faisait partie, faut-il le rappeler?), celle de l'OEA (Organisation des Etats américains), celle de l'Union africaine (mais rien en Asie ni dans les pays communistes). Ces conventions reprenaient les thèmes de la DUDH, notamment, l'égalité homme-femme, la condamnation du racisme, le droit à chercher asile devant la persécution, le droit à un procès équitable, l'interdiction de la torture et des mauvais traitements, le droit à l'éducation, à la santé et à la sécurité sociale.

Parallèlement aussi, le CICR que soutenait particulièrement la Suisse faisait adopter pratiquement par tous les Etats, les Conventions de Genève (1949) et leurs Protocoles additionnels (1977).

Ce foisonnement juridique eut-il des effets?

Rappelons que c'est dans la même période qu'éclatèrent la guerre de Corée (1950-53), celle d'Indochine (commencée en 1946) celles du Vietnam et du Cambodge (jusqu’en 1975), la guerre de Colombie, la guerre d'Algérie, les guerres d’Israël contre les populations arabes, que des coups d'Etat eurent lieu en Indonésie, en Iran, en Amérique latine (celui du Chili en 1973 est le plus connu), que l'apartheid fut institutionnalisé, la torture généralisée, tout cela avec le soutien des Etats-Unis et des pays occidentaux (les pays communistes et ceux du Tiers-monde ne faisaient en général pas mieux). Plus récemment il y eut les guerres des Balkans et du Moyen-Orient avec toutes leurs atrocités.

Alors à quoi a-t-il servi?

D'abord les opprimé-e-s de la Terre ont pu revendiquer des droits, ce qui leur a permis de s'organiser, de mener des combats, souvent durement réprimés. Dans de rares cas des régimes sont tombés: apartheid en Afrique du Sud, régime communiste en URSS. La DUDH s’est inscrite dans le processus de construction de contre-pouvoirs à la rationalité économique.

Un événement charnière

L'attentat du 11 septembre 2001 contre les tours du World Trade Center et le Pentagone a marqué un tournant. Depuis lors la lutte contre le terrorisme a eu la priorité, parfois au mépris des droits humains.

La DUDH est-elle encore valable?

Depuis le milieu du XXe siècle on a exigé de nouveaux droits: par exemple le droit à un environnement sain, le droit à la paix, l'interdiction de la traite des femmes. Certains voudraient réécrire la DUDH. Ce serait une opération fort dangereuse car on risquerait d'y introduire des droits contestables tels que la liberté économique, la lutte anti-terroriste au mépris des autres DH. Mieux vaut garder la DUDH tout en étant attentifs à de nouvelles exigences. Mais le rappel des droits fondamentaux et de leurs violations doit continuer à faire l'objet de notre vigilance et de l'enseignement que nous voulons donner à nos enfants. Le 10 décembre 2018 pourrait nous donner l'occasion de le rappeler.

Dans un prochain numéro, nous
examinerons comment la Suisse
respecte la Déclaration
des droits humains...

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