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Août 2015
Plaine des héros
Lu par : Mousse Boulanger

Plaine des héros
Yves Laplace, Editions Fayard

Voici un livre qui se réfère à un événement qui avait fait l’objet d’une publication en 1933, éditée par la Fédération suisse des Socialistes religieux, à l’Imprimerie populaire de Lausanne, sous le titre: À la recherche de la vérité. Il s’agit de la fusillade du 9 novembre 1932 ordonnée par l’armée suisse contre des manifestants désarmés sur la plaine de Plainpalais à Genève.

Le roman-enquête d’Yves Laplace fait revivre une figure genevoise qui a plaqué sur la ville l’image du fascisme le plus virulent qu’ait pu connaître notre pays à une époque où naissaient les premières manifestations des forces ouvrières. Le porteur de cette image s’appelait Georges Oltramare, écrivain de talent, auteur de théâtre, passionné de politique. En plus de tous ces attributs d’intelligence, la nature l’a doté d’une figure aux charmes quasiment irrésistibles, ce qui lui valu le surnom de «Beau Géo». En 1923 il lance un journal intitulé «Le Pilori» dans lequel s’étale une maladie pour laquelle on n’a jamais trouvé de vaccin, c’est-à-dire l’antisémitisme, à laquelle vient s’ajouter l’antisocialisme. Toute personne affichant le moindre reflet favorable au monde ouvrier est fustigée, calomniée, copieusement passée au Pilori.

À Plainpalais, ce mois de novembre 1932, Oltramare a rassemblé ses partisans – et il y en a, de véritables enragés! La gauche organise une contre-manifestation sur laquelle l’armée suisse va se déchaîner faisant 13 morts et 65 blessés. Ce tragique épisode est inclus dans le roman d’Yves Laplace qui pousse son enquête beaucoup plus loin, jusqu’à faire un voyage à Moscou avec un mystérieux neveu d’Oltramare. «Le petit Duce de Genève», qui n’a pas d’enfant, se conduit comme un père attentionné avec ce faux neveu d’origine juive. Oltramare finira collaborateur nazi et sera condamné à mort par contumace, en France, à la libération. En Suisse il fera quelques mois de prison et mourra d’un infarctus en 1964. Dans le livre d’Yves Laplace on éprouve parfois un malaise devant une espèce de perversité à côtoyer en écriture un personnage aussi malveillant, totalement cruel et pourtant fascinant. Ce qui est certain, pour ceux qui aime l’histoire de notre pays, une fois commencé, on ne lâche plus la «Plaine des héros».

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